2023-09-26

Des scientifiques en procès pour avoir alerté sur la crise écologique

Scientifiques en rébellion & Extinction Rebellion

Le 5 octobre 2023, 7 scientifiques et activistes seront en procès à Paris pour avoir alerté sur la crise écologique au cours d’une conférence-occupation au Muséum national d’histoire naturelle dans la soirée du 9 au 10 avril 2022. Cet événement, issu d’une collaboration entre Scientifiques en rébellion et Extinction Rebellion (XR), se tenait symboliquement dans la galerie des fossiles du Muséum. Ce fut la première action de désobéissance civile organisée par des scientifiques en France. Scientifiques en rébellion et Extinction Rebellion dénoncent les poursuites dont sont l’objet les scientifiques lanceurs et lanceuses d’alerte : comme le clamait une banderole, « Dire la vérité n’est pas un crime ». Plusieurs personnalités scientifiques viendront témoigner lors du procès en soutien aux personnes poursuivies et un rassemblement aura lieu à cette occasion.

Le 5 octobre 2023 dans la matinée, 7 scientifiques et activistes passeront en procès devant le Tribunal de police de Paris suite à une action réalisée en avril 2022 pour alerter sur les conséquences de l’inaction climatique du gouvernement. Les personnes poursuivies contestent les amendes de 5e classe qui leur avaient été infligées dans un premier jugement pour être resté.es après l’horaire de fermeture du Muséum national d’histoire naturelle à Paris.

Le procès sera l’occasion pour les accusé.es de défendre la légitimité de leur action au regard de l’urgence climatique et de la perspective de la sixième extinction de masse. Pour leur défense, ils et elles invoqueront l’état de nécessité en raison du danger actuel et imminent qui pèse sur le vivant tel que démontré notamment par les travaux du Giec et de l’IPBES. Des personnalités scientifiques reconnues viendront témoigner pendant l’audience, en soutien aux accusé.es : Pierre-Henri Gouyon (biologiste, Muséum national d’histoire naturelle), Christophe Bonneuil (historien des sciences, CNRS) et Fabrice Flipo (philosophe des sciences, Institut Mines Telecom). Un rassemblement de soutien et des prises de parole de scientifiques auront lieu avant le début du procès.

La soirée du 9 au 10 avril 2022, en pleine campagne pour les élections présidentielles, une trentaine de scientifiques ont occupé la galerie de paléontologie du Muséum national d’histoire naturelle. Entouré.es de fossiles en allégorie aux risques existentiels qui pèsent sur notre espèce et sur le vivant, des scientifiques de spécialités variées (océanographie, écologie, agronomie, biologie, infectiologie, informatique et histoire) ont réalisé une douzaine de présentations illustrant les mesures urgentes, radicales et nécessaires qui doivent être prises afin de limiter les conséquences des crises climatique et écologique en cours et à venir.

La vidéo complète des conférences est disponible ici et des images ici.

Il s’agissait de la première action organisée en France par le collectif Scientifiques en rébellion, issu de l’appel de 1000 scientifiques à la désobéissance civile publié dans le journal Le Monde en février 2020. Elle était organisée conjointement par Extinction Rebellion et Scientifiques en rébellion, dans le cadre d’une campagne internationale de Scientist Rebellion. L’action annonçait également la campagne d’XR qui allait suivre avec, notamment, l’occupation d’une partie des Grands Boulevards pendant le week-end du 16 avril.

Les participant.es ont quitté les lieux dans le calme à l’issue des présentations scientifiques, sans avoir créé aucun dégât matériel à ce lieu symbolique. Pourtant, elles et ils sont aujourd’hui poursuivi.es en justice. Alors que l’État français a été condamné par le Conseil d’État pour inaction climatique et que le gouvernement ne prend toujours pas de mesures exigées par la justice, ce sont les scientifiques qui sont inquiété.es pour avoir joué leur rôle de lanceurs et lanceuses d’alerte ! L’histoire retiendra qu’en plein « effondrement climatique » (selon les mots du Secrétaire général de l’ONU), la France était plus occupée à poursuivre les scientifiques qu’à prendre des mesures à la hauteur de l’urgence.

Ce n’est pas la première fois que des scientifiques français.es font face à une répression judiciaire pour des actions de désobéissance civile. En novembre 2022, 16 scientifiques (dont 4 Français) ont été emprisonné.e.s pendant une semaine en Allemagne pour s’être collé les mains à des automobiles de luxe dans un showroom BMW à Munich, dans le cadre d’une campagne internationale de Scientist Rebellion. Une tribune de soutien sur France TV Info avait alors été signée par 1300 scientifiques. En octobre 2021, un astrophysicien a été poursuivi avec six autres activistes pour s’être introduit sur le tarmac de l’aéroport de Roissy afin de dénoncer le caractère climaticide de l’extension du terminal 4, une action à laquelle participaient d’autres membres de Scientifiques en rébellion. Une tribune de soutien parue dans Reporterre avait recueilli près de 300 soutiens. La répression des scientifiques n’est qu’une illustration de la stratégie de criminalisation des mouvements sociaux et notamment des mouvements écologistes par le gouvernement, qui frappe aussi bien les actions de désobéissance civile que les manifestations. Ainsi, rien que durant la première quinzaine d’octobre, des militant.es d’Extinction Rebellion doivent déjà faire face à trois procès différents.