2023-06-26

À Toulouse, des scientifiques et étudiant·es interrompent une table ronde organisée à l’Université Paul Sabatier où était conviée TotalEnergies

Le 26 juin 2023, une table ronde sur « l’interdisciplinarité dans le cadre de la transition énergétique » était organisée à l’Université Paul Sabatier. A son début, vers 11h45, des membres de Scientifiques en rébellion et des étudiant·es l’ont interrompu en raison de la présence de TotalEnergies. Ils ont déployé une banderole sur laquelle était écrit « Qui sont les vrais éco-terroristes ? » et ont dénoncé à l’oral la présence de TotalEnergies.

Les liens troubles entre l’Université et la multinationale fossile avaient déjà été dévoilés par le Canard enchaîné, dans deux articles publiés le 12 octobre 2022 et le 9 novembre 2022, et également dans un article de Reporterre. On y apprenait l’intervention d’employé·es de TotalEnergies dans un master sur la transition énergétique dirigé par un enseignant qui n’a rien contre le climatoscepticisme. On y apprenait également la signature d’un contrat de 3000 € entre TotalEnergies et l’Université Paul Sabatier dans lequel cette dernière affirme qu’elle « s’abstiendra de faire toute communication directe ou indirecte, écrite ou orale, susceptible de porter atteinte à l’image et à la notoriété de TotalEnergies ».

Au cours de leur intervention, les scientifiques ont rappelé que TotalEnergies refuse d’arrêter l’ouverture de nouveaux gisements fossiles, condition sine qua non pour respecter l’accord de Paris de 2015. Ils et elles ont également listé les stratégies passées ou présentes de l’entreprise pour justifier la poursuite de sa politique, et notamment celle sur le gaz : «Total investit massivement dans le gaz en le présentant comme une alternative au charbon pour une transition bas carbone. C’est faux ! Les dernières études montrent qu’il suffit de 3% de fuites entre l’extraction du gaz et sa combustion pour que son impact climatique soit pire que celui du charbon. Or de telles fuites existent et dépassent parfois ce seuil de 3%, surtout dans le cas du gaz liquéfié pour lequel Total développe de nouvelles infrastructures en France. Total le sait et continue dire que le gaz diminue les émissions de moitié par rapport au charbon. C’est faux !! ».

Les scientifiques ont également critiqué la communication consistant à mettre en avant le développement des énergies renouvelables : « Enfin Total, met en avant ses projets d’énergie renouvelable, qui sont une bonne chose. Mais avoir des projets d’énergie renouvelable n’empêche pas les émissions de CO2 des projets fossiles – les fameuses bombes climatiques – dans l’atmosphère. Le groupe se conduit comme un alcoolique auquel on diagnostiquerait une cirrhose du foie, et qui répondrait : « OK, donc je double ma consommation d'alcool, mais tout va bien puisque ma consommation d'eau, je la triple ! » ».

Les scientifiques ont également dénoncé avec vigueur l’accord signé entre l’Université Paul Sabatier et TotalEnergies. « Pour 3000 €, on achète le silence d’une institution !!! Bravo TotalEnergies ! Après la signature, vous avez sabré le champagne et bien dû vous moquer, avec raison, des personnes irresponsables qui ont proposé et signé un pareil accord. »

Les scientifiques et les étudiant·es ont ensuite assisté à la table ronde, qui était animée par Jean-Francois Georgis, l’enseignant de l’Université mis en cause dans les articles du Canard enchaîné. La table ronde a été ponctuée par quelques échanges vigoureux, l’animateur de la table ronde qualifiant l’intervention des scientifiques et étudiant·es « d’intervention minable ». Face au rappel par les scientifiques que leur intervention s’appuie sur les rapports du GIEC, l’animateur a répondu que « le GIEC, c’est la nouvelle Bible », rappelant ainsi aux yeux de toutes et tous le peu de cas qu’il fait du contenu de ces rapports. Au cours de la table ronde, plusieurs intervenant·es ont insisté sur la responsabilité des consommateurs et de « la demande », un argument classique de TotalEnergies qui a déjà été débunké ici.

Scientifiques en rébellion est un collectif national de scientifiques révoltés par l’inaction face à l’urgence écologique. Le collectif a réalisé plusieurs actions au cours du mois de mai ciblant spécifiquement les multinationales fossiles et leurs financeurs, afin de rappeler le constat scientifique actuel : respecter l’accord de Paris nécessite de ne plus ouvrir de nouveaux gisements d’énergie fossile.